Arequipa & le canyon de la Colca
…à nouveau dans un bus. De nuit, cette fois. Arrivés à Arequipa sur les coups de 8h. Un taxi, négocié à 50%, comme d’hab.
Nous voici dans le centre de cette très charmante ville. Direction l’hôtel Wayra River, pour une journée “cooling down”.
Nous prenons nos marques dans nos chambres respectives…un peu miteuses! Par contre, la terrasse est sympa. Un soleil splendide l’abreuve de ses rayons. Une vue grandiose sur la ville et sur les montagnes environnantes. Et, en particulier, sur le Misti. Un volcan qui culmine à 5.825m et 1.500m au-dessus de l’Altiplano. Alors, qu’est-ce que l’Altiplano? Il s’agit de la plaine d’altitude située au cœur de la Cordillère des Andes et qui s’étend sur 4 pays (Argentine, Bolivie, Chili et Pérou). C’est la plus haute région habitée au monde, après le plateau tibétain. Nous y reviendrons dans quelques temps.
Malgré la fatigue accumulée, nous ne résistons pas à aller nous balader dans Arequipa. En effet, nos premières impressions (depuis le taxi) étaient vraiment bonnes. Elles se confirment.
Arequipa est la seconde ville la plus peuplée du pays. Pourtant, cela ne se ressent pas trop. Sauf, peut-être, les incessants klaxons qui aiment la ville. Nous avons quitté la zone désertique côtière du Pérou, pour pénétrer, lentement, mais surement, dans les Andes péruviennes (le pays compte une troisième zone bien définie, la forêt tropical. Mais nous n’y mettrons pas les pieds). Dans la période pré-Inca (un peu plus d’un siècle, entre le début du 15° et la fin du 16° siècle), la région était habitée par les Aymaras.
Ce terme désigne à la fois le peuple et la langue. Cette dernière fut largement répandue dans l’Altiplano, devenant la langue officielle de l’empire Inca (certains historiens affirment que ce fut le quechua. Le doute subsiste). La langue aymara est d’une grande flexibilité, car elle est basée sur une logique trivalente (nos langues européennes sont binaires: soit vrai ou faux) et n’admet aucune exception, grâce à sa structure mathématique. Elle est encore utilisée dans certaines régions (au bord du lac Titicaca et en Bolivie. Evo Morales, président bolivien, est, d’ailleurs, Aymara).
Le peuple Aymara, quant à lui, trouve son origine sur les rives du lac Titicaca et fondait son économie sur l’agriculture et la chasse. Ils avaient une conception inversée du temps (le passé est devant, le futur derrière, car inconnu et invisible) et connurent leur apogée vers l’an 900. Puis, vint la colonisation Inca (on ne sait dire s’ils se sont intégrés ou s’ils se sont battus, avant d’être intégrés), avant l’espagnole. Cette dernière est encore bien visible dans le centre de la cité d’Arequipa. Les places, les habitations en portent encore le sceau.
Une Plaza de Armas ”juste” charmantifiante (Comment? Ce mot n’existe pas?). La plus belle du Pérou, selon notre bible. Des maisons d’architecture coloniale grandioses. Une ambiance détendue. Des rues piétonnes agréables. Un Starbucks (euh…et alors?). Des petites échoppes attirantes. Le tout, “arrosé” par un soleil salutaire. Car, lorsqu’il s’en va, on se les gèle. Nous ne sommes pas à plus de 2.300m pour rien.
Cette belle promenade s’achève par un pollo a la brasa, un poulet grillé. Vu le nombre de mini-restos de pollo, on se devait de le goûter. Une salle exigüe. Un service plus qu’approximatif. Des couverts et une table pas très propres. Une soupe avec des morceaux de foie et de cœur de poulet, pas mauvaise du tout. Un poulet goutu. Un peu plus de 10€ pour 4. Pas de doute, c’est local et ça fait plaisir.
A boire? Ah oui. Pas de Cusqueña, ni même d’Arequipeña, cette fois-ci. Mais une bouteille de Inca Kola. Non, vous ne rêvez pas. Les Incas ont leur propre soda. Une couleur jaune étonnante. Un goût de bonbon chimique. Nels n’a pas kiffé. Angie, si.
“Au moins, c’est local”, nous disions-nous! C’était avant d’apprendre que le groupe Coca-Cola a mis la main sur la marque péruvienne, depuis 1999, et au terme de décennies de guerres marketing. Schéma classique en Amérique latine (et ailleurs). Une production locale aux mains des multinationales, et dont les capitaux quittent, désormais, le pays. En échange? Peanuts! Au final, les locaux payent aussi (voire plus) cher l’Inca Kola que le Coca-Cola. Qui en tire profit?
Passons ces considérations politico-économiques pour nous intéresser à notre soirée. Consacrée (encore) au planning. Angie & Nels se démènent pour offrir à leurs mamans des moments inoubliables. Autour d’un café, le débat concerne la suite des évènements. Et en particulier, la meilleure façon d’aborder le canyon de la Colca. Les mamans vont dormir. Nous faisons la connaissance d’un groupe de jeunes portugais, venus étudier à Lima. Sympas!
Deuxième journée. Petit dej’ copieux. Prélassement sur la terrasse. Un peu de couture pour Mae. Skype pour Choum (un petit coucou à BernadO, resté en Belgique).
Vers midi, on s’active. Direction le terminal de bus (pour acheter nos tickets de bus pour le canyon de la Colca) en collectivo, ces mini-bus, bondés et couleur locale.
Une petite arnaque à la fausse pièce de 5 soles plus tard, et nous achetons nos tickets. Une bonne chose de faite.
Nous décidons de nous “perdre” dans le coin. Des quartiers plus pauvres et délabrés, qui n’ont rien à voir avec ceux du centre, tant au niveau architectural qu’en ce qui concerne les habitants. Point de bâtiments coloniaux, plutôt des constructions inachevées en brique rouge. Aucune trace de la bourgeoisie locale, non plus.
Nous nous rendons au marché. Un vrai marché. Fruits, légumes, gazinières, pièces détachées diverses, habits, machines à coudre, couvertures, mais pas d’artisanat (normal, pas de touristes ici). Les mamans s’offrent des chapeaux pour le canyon de la Colca et nous reprenons un collectivo pour le centre. En effet, nous avons rendez-vous avec le couvent de Santa Catalina.
Un peu cher, mais ça en vaut vraiment la peine. Le plus important édifice religieux du Pérou. Le plus grand couvent du monde, plus de 20.000m². Une véritable ville dans la ville. Des rues, des petites places, des jardins, une piscine, des cloitres. Une véritable forteresse, aux tons bleus et oranges, qui fut fondée en 1579. Le couvent abrita (et en abrite encore une trentaine) plus de 400 religieuses, issues des grandes familles espagnoles (une dot non-négligeable était demandée), pendant des siècles. Ces dernières vivaient à l’abri des regards, sans mot dire, entourées de servantes, dans des chambres grand luxede vrais lofts avec jacuzzi (pour l’époque, bien sur). Ce n’est que dans les années 70 que le couvent fut ouvert au public. C’est splendide!
Après cette visite enrichissante, nous décidons de nous offrir un bon resto. Le Routard nous “guide” dans un quartier au nord de la ville, Yanahuara. Hyper mignon. Classe moyenne supérieure. Toutefois, c’est la fête du saint-protecteur des pêcheurs…tout est fermé. Direction un quartier à l’ouest, près du parque metropolitano, pour une parillada, un barbec’. Nous évitons les anticuchos, des brochettes grillées de morceaux de cœur de bœuf, et nous précipitons sur les entrecôtes de porc et de bœuf. Pas mauvais. Surtout, accompagné d’un vin scrupuleusement (qui a dit que c’était le seul?) choisi parnous le patron.
Nous rentrons et essayons de nous coucher tôt. Terminé les ballades, place au trek!
A l’aube, l’équipe des 4 est prête. Opération délicate en vue. En effet, nous envisageons de laisser nos gros bagages au comptoir Cruz del Sur, qui ouvre à 5h et se trouve dans le terminal “est”, avant de prendre un bus de la compagnie (Cruz del Sur n’étant pas actif sur cette ligne) Los Milagros (“les miracles”…ça promet) à 5h15 dans le terminal “ouest”.
C’est délicat, mais nous tentons le coup. Aprèsun coup de boule de pénibles négociations avec Cruz del Sur (pour qu’ils acceptent nos bagages à 5h au lieu de 6h), nous rejoignons nos mamans et prenons place dans notre Los Milagros, direction le village de Cabanaconde, qui se trouve au bord du canyon de la Colca.
Quelques explications.
Le canyon de la Colca est un impressionnant canyon, situé au nord d’Arequipa. Son point culminant est à 4.350m d’altitude, et sa profondeur est de…3.400m (pour rappel, le Grand Canyon, aux states, ne fait, au maximum, “que” 2.000m de profondeur). Tout en bas, coule la rivière Colca.
En général, les touristes y vont en tour, s’arrêtent pour la nuit dans le premier village, du nom de Chivay. Ils longent ensuite le canyon en bus pour admirer certains points de vue (tel Cruz del Condor, où les locaux dispersent de la viande dans la vallée, pour appâter le condor…et le touriste) et puis s’en vont.
Toutefois, il est possible, depuis le village (à 2h de Chivay) de Cabanaconde, de descendre dans le canyon. De rejoindre un oasis, tout en bas, au bord de la rivière, et d’y passer la nuit. Ensuite, soit remonter par le même chemin (si on a peu de temps), soit poursuivre le trek jusqu’aux villages sur l’autre versant, y dormir une seconde nuit (voire une troisième), et rentrer à Cabanaconde par un autre chemin.
Nous avons beaucoup hésité. Vous nous connaissez…on est des trekkeurs (ne pas rire…). Alors, on opte, évidemment, pour la descente dans le canyon. Non, sans avoir interrogé les mamans sur leur condition physique et leurs envies. Elles souhaitent relever le défi.
Vu que le temps nous est compté. On pense passer la nuit dans l’oasis, et remonter le lendemain. Ce qui est déjà pas mal, compte tenu des 1000 mètres de dénivelé (entre Cabanaconde et l’oasis).
Aussitôt pensé, aussitôt arrivés à Cabanaconde. Un charmant village, au cœur de…nulle part. Nous prenons des forces dans la maison des français. Un petit hôtel, nommé Valle del Fuego, tenu par Yamil et sa sœur. Il nous donne quelques conseils et nous propose, d’une fois arrivés à l’oasis, dormir chez Pablito, son frère. Une belle histoirede fric famille.
1, 2, 3…partez! Départ du trek. Les mamans semblent confiantes. A l’inverse, Angie & Nels se rendent très vite compte que ça va être “coton”. Le chemin est rocailleux, avec des marches très inégales, de la poussière. Bref, c’est pas hyper agréable. L’oasis est un minuscule point…tout en bas. Nous hésitons à proposer aux mamans de faire demi-tour, craignant pour la descente, mais surtout pour la montée du lendemain. Mais vu leur enthousiasme et leur détermination, nous ne voulons pas les décevoir. On poursuit.
Les paysages sont grandioses. Vraiment superbes. Peu de trekkeurs. Quelques mules. Et quelques locaux. Dont Panchito, un indien qui nous aborde en quechua (non! Pas la marque de chez Décathlon). Le quechua est la lingua franca (la langue véhiculaire, comme l’anglais de nos jours, dans bon nombre de pays) des Incas (et non, sa langue officielle – qui est l’aymara). Elle est toujours utilisé au Pérou et en Bolivie, et y est même devenu une langue officielle. Mais nous y reviendrons plus tard. Un vrai personnage que ce Panchito. Il monte le canyon à une allure folle, et ce, malgré ces bons 60 ans.
Les heures passent. L’oasis semblent être un mirage. Il ne semble pas se rapprocher. Ce n’est pas pour nous rassurer. Cela fait déjà 5h que nous marchons. La descente est normalement prévue en 2 à 3h. Nous tentons de rester rassurants vis-à-vis de nos mamans. Mais la tombée de la nuit n’est plus loin. Mae commence à stresser de ne plus rien voir dans le noir, et file telle une flèche. Choum mord sur sa chique et continue à avancer malgré sa cheville gonflée. Elles sont vraiment courageuses!
Il est 18h, la nuit est quasiment tombée, nous avons marché 6 heures. Ce n’est vraiment pas une promenade! Les mamans ont tout donné et nous sommes très fiers d’elles. “Oasis, nous voici”!
La délivrance de l’arrivée fait vite place à deux soucis:
1. Il n’y a plus de place. Ni chez Pablito, ni ailleurs. Il ne reste qu’un dortoir (très sommaire) avec deux lits (les deux autres sont pris par un couple de hollandais). Nels parlemente avec le très sympa Pablito. Il nous trouve une vieille tente pourrie, plantée “avec les cochons”, dans laquelle nous pouvons dormir. Ca nous enchante moyen, mais c’est mieux que rien!
Tout cela, c’était sans compter sur la gentillesse légendaire du hollandais. Verdooooome jonge! En effet, le jeune couple nous propose de ne garder qu’un lit, ainsi nous pouvons prendre le troisième. YEEES!
2. La montée du lendemain. Nels s’est mis en tête (à juste titre) que ce sera too much pour les mamans. Trop long (il nous faut être à 13h à Cabanaconde pour prendre un bus de retour) et surtout, trop difficile.
La solution? Les mules. Malgré un premier refus des mamans, nous insistons. C’est la meilleur solution. Pour Choum, c’est une vrai épreuve qui se profile à l’horizon. Mais c’est la seule façon d’y arriver.
Ces deux problèmes résolus, nous pouvons prendre nos marques dans l’oasis (dont nous ne verrons pas grand chose finalement). Les conditions sont plus que basiques. Ce détail est vite oublié lorsque nous passons à table. Nous la partageons avec un couple de français. Un bon repas et un bon thé, avant de filer au lit. Dans notre dortoir: 4 murs, un toit, 4 lits.
Le réveil sonne à 5h20. Le petit dej’ pour nous donner des forces. Le muletier nous demande de le suivre. Les nombreuses mules sont garées à proximité. Nos mamans ne sont pas les seules. Une douzaine de personnes sont de la partie. A notre grand étonnement, des petits jeunes de 20 ans s’épargnent également la montée à pieds (un scaaandaaale, mon p’ti môsieur!). Nels paye le muletier et lui rappelle clairement que les deux mamans doivent faire le périple E.N.S.E.M.B.L.E. (chacune sa mule) et qu’un muletier doit tenir au moins la mule de Choum.
Evidemment, rien ne se passe comme prévu. Les mamans sont les dernières. La mule de Choum est envoyée en premier, au galop, et seule. C’est la panique. Mae, telle une gaucho, se précipite sur sa mule et essaye de la chevaucher pour partir à la poursuite de Choum. Angie & Nels crient sur le muletier, en lui rappelant que ce n’est pas ce qui était prévu, et qu’il a intérêt à rattraper le coup.
Au loin, nous les suivons des yeux. Et, sommes à moitié rassurés de voir que le muletier et Mae ont rattrapés Choum. Toutefois, nous demeurons inquiets. Quand on voit la façon dont les mules abordent la montée, on ne peut s’empêcher de penser à la chute.
A notre tour, nous nous lançons à l’assaut du canyon. Munis de nos bâtons, allégés de nos sacs (sur les mules), chaussés de nos belles chaussures de trek, nous entamons la montée au rythme de champions. L’inquiétude pour nos mamans nous fait pousser des ailes karmichiennes (voir nos articles au Népal). Nous dépassons très vite les groupes partis avant nous. Angie mène le bal. Nels ne pourrait aller plus vite. En parfaite symbiose, nous organisons la montée sur les 1000 mètres de dénivelé. Une pause après avoir pris 500m, pas avant! Les paysages sont toujours aussi impressionnants. Mais notre objectif est d’atteindre Cabanaconde, au plus vite.
C’est chose faite, après…2h30 de montée! 2h30 au lieu des 3 à 5h prévues. Nous retrouvons nos mamans saines et sauves (le danger était réel. Dans le groupe, une jeune femme a chuté de sa mule…sans grand dommage). Le soulagement! Nous avions un peu sous-estimé ce trek. Heureusement, tout se termine bien. Avec au passage, une superbe expérience pour nos mamans. Choum aura dépassé sa peur. Mae aura kiffé l’aventure.
Une bonne douche et une steak d’alpaga pour tout le monde (Nels fera l’impasse sur le steak). Une petite promenade dans Cabanaconde et hop…un nouveau bus! 5h avec Los Milagros pour retourner à Arequipa.
Le trajet est long, mais S.P.L.E.N.D.I.D.E.! Le soleil se couche sur l’Altiplano. Ses rayons oranges éclairent les sommets et nous offrent un spectacle inoubliable. En guise de bande originale, un CD (qui aura tourné en boucle) de tubes péruviens. Musique romantique, légèrement mélancolique, dont les textes mettent à l’honneur l’amour et l’absence de l’être aimé. Mignon!
Nous arrivons à Arequipa. Le soleil s’est couché depuis longtemps. Pas nous. Le terminal de bus sera notre abri pour quelques heures. Nous récupérons nos affaires. Rangeons nos sacs. Et avalons une merveilleuse spécialité locale: la papa rellena, une pomme de terre fourrée de viande hachée. Mmmh.
Un nouveau bus de nuit. Cruz del Sur, encore! Le trajet sera pénible… Angie tombe malade (l’alpaga probablement) et passe une nuit horrible. Le soleil se lève, nous arrivons enfin à Cusco.
Nous avons besoin d’un peu de repos…
A suivre…
Les photos sont ICI!
Nels
Nous voici dans le centre de cette très charmante ville. Direction l’hôtel Wayra River, pour une journée “cooling down”.
Nous prenons nos marques dans nos chambres respectives…un peu miteuses! Par contre, la terrasse est sympa. Un soleil splendide l’abreuve de ses rayons. Une vue grandiose sur la ville et sur les montagnes environnantes. Et, en particulier, sur le Misti. Un volcan qui culmine à 5.825m et 1.500m au-dessus de l’Altiplano. Alors, qu’est-ce que l’Altiplano? Il s’agit de la plaine d’altitude située au cœur de la Cordillère des Andes et qui s’étend sur 4 pays (Argentine, Bolivie, Chili et Pérou). C’est la plus haute région habitée au monde, après le plateau tibétain. Nous y reviendrons dans quelques temps.
Malgré la fatigue accumulée, nous ne résistons pas à aller nous balader dans Arequipa. En effet, nos premières impressions (depuis le taxi) étaient vraiment bonnes. Elles se confirment.
Arequipa est la seconde ville la plus peuplée du pays. Pourtant, cela ne se ressent pas trop. Sauf, peut-être, les incessants klaxons qui aiment la ville. Nous avons quitté la zone désertique côtière du Pérou, pour pénétrer, lentement, mais surement, dans les Andes péruviennes (le pays compte une troisième zone bien définie, la forêt tropical. Mais nous n’y mettrons pas les pieds). Dans la période pré-Inca (un peu plus d’un siècle, entre le début du 15° et la fin du 16° siècle), la région était habitée par les Aymaras.
Ce terme désigne à la fois le peuple et la langue. Cette dernière fut largement répandue dans l’Altiplano, devenant la langue officielle de l’empire Inca (certains historiens affirment que ce fut le quechua. Le doute subsiste). La langue aymara est d’une grande flexibilité, car elle est basée sur une logique trivalente (nos langues européennes sont binaires: soit vrai ou faux) et n’admet aucune exception, grâce à sa structure mathématique. Elle est encore utilisée dans certaines régions (au bord du lac Titicaca et en Bolivie. Evo Morales, président bolivien, est, d’ailleurs, Aymara).
Le peuple Aymara, quant à lui, trouve son origine sur les rives du lac Titicaca et fondait son économie sur l’agriculture et la chasse. Ils avaient une conception inversée du temps (le passé est devant, le futur derrière, car inconnu et invisible) et connurent leur apogée vers l’an 900. Puis, vint la colonisation Inca (on ne sait dire s’ils se sont intégrés ou s’ils se sont battus, avant d’être intégrés), avant l’espagnole. Cette dernière est encore bien visible dans le centre de la cité d’Arequipa. Les places, les habitations en portent encore le sceau.
Une Plaza de Armas ”juste” charmantifiante (Comment? Ce mot n’existe pas?). La plus belle du Pérou, selon notre bible. Des maisons d’architecture coloniale grandioses. Une ambiance détendue. Des rues piétonnes agréables. Un Starbucks (euh…et alors?). Des petites échoppes attirantes. Le tout, “arrosé” par un soleil salutaire. Car, lorsqu’il s’en va, on se les gèle. Nous ne sommes pas à plus de 2.300m pour rien.
Cette belle promenade s’achève par un pollo a la brasa, un poulet grillé. Vu le nombre de mini-restos de pollo, on se devait de le goûter. Une salle exigüe. Un service plus qu’approximatif. Des couverts et une table pas très propres. Une soupe avec des morceaux de foie et de cœur de poulet, pas mauvaise du tout. Un poulet goutu. Un peu plus de 10€ pour 4. Pas de doute, c’est local et ça fait plaisir.
A boire? Ah oui. Pas de Cusqueña, ni même d’Arequipeña, cette fois-ci. Mais une bouteille de Inca Kola. Non, vous ne rêvez pas. Les Incas ont leur propre soda. Une couleur jaune étonnante. Un goût de bonbon chimique. Nels n’a pas kiffé. Angie, si.
“Au moins, c’est local”, nous disions-nous! C’était avant d’apprendre que le groupe Coca-Cola a mis la main sur la marque péruvienne, depuis 1999, et au terme de décennies de guerres marketing. Schéma classique en Amérique latine (et ailleurs). Une production locale aux mains des multinationales, et dont les capitaux quittent, désormais, le pays. En échange? Peanuts! Au final, les locaux payent aussi (voire plus) cher l’Inca Kola que le Coca-Cola. Qui en tire profit?
Passons ces considérations politico-économiques pour nous intéresser à notre soirée. Consacrée (encore) au planning. Angie & Nels se démènent pour offrir à leurs mamans des moments inoubliables. Autour d’un café, le débat concerne la suite des évènements. Et en particulier, la meilleure façon d’aborder le canyon de la Colca. Les mamans vont dormir. Nous faisons la connaissance d’un groupe de jeunes portugais, venus étudier à Lima. Sympas!
Deuxième journée. Petit dej’ copieux. Prélassement sur la terrasse. Un peu de couture pour Mae. Skype pour Choum (un petit coucou à BernadO, resté en Belgique).
Vers midi, on s’active. Direction le terminal de bus (pour acheter nos tickets de bus pour le canyon de la Colca) en collectivo, ces mini-bus, bondés et couleur locale.
Une petite arnaque à la fausse pièce de 5 soles plus tard, et nous achetons nos tickets. Une bonne chose de faite.
Nous décidons de nous “perdre” dans le coin. Des quartiers plus pauvres et délabrés, qui n’ont rien à voir avec ceux du centre, tant au niveau architectural qu’en ce qui concerne les habitants. Point de bâtiments coloniaux, plutôt des constructions inachevées en brique rouge. Aucune trace de la bourgeoisie locale, non plus.
Nous nous rendons au marché. Un vrai marché. Fruits, légumes, gazinières, pièces détachées diverses, habits, machines à coudre, couvertures, mais pas d’artisanat (normal, pas de touristes ici). Les mamans s’offrent des chapeaux pour le canyon de la Colca et nous reprenons un collectivo pour le centre. En effet, nous avons rendez-vous avec le couvent de Santa Catalina.
Un peu cher, mais ça en vaut vraiment la peine. Le plus important édifice religieux du Pérou. Le plus grand couvent du monde, plus de 20.000m². Une véritable ville dans la ville. Des rues, des petites places, des jardins, une piscine, des cloitres. Une véritable forteresse, aux tons bleus et oranges, qui fut fondée en 1579. Le couvent abrita (et en abrite encore une trentaine) plus de 400 religieuses, issues des grandes familles espagnoles (une dot non-négligeable était demandée), pendant des siècles. Ces dernières vivaient à l’abri des regards, sans mot dire, entourées de servantes, dans des chambres grand luxe
Après cette visite enrichissante, nous décidons de nous offrir un bon resto. Le Routard nous “guide” dans un quartier au nord de la ville, Yanahuara. Hyper mignon. Classe moyenne supérieure. Toutefois, c’est la fête du saint-protecteur des pêcheurs…tout est fermé. Direction un quartier à l’ouest, près du parque metropolitano, pour une parillada, un barbec’. Nous évitons les anticuchos, des brochettes grillées de morceaux de cœur de bœuf, et nous précipitons sur les entrecôtes de porc et de bœuf. Pas mauvais. Surtout, accompagné d’un vin scrupuleusement (qui a dit que c’était le seul?) choisi par
Nous rentrons et essayons de nous coucher tôt. Terminé les ballades, place au trek!
A l’aube, l’équipe des 4 est prête. Opération délicate en vue. En effet, nous envisageons de laisser nos gros bagages au comptoir Cruz del Sur, qui ouvre à 5h et se trouve dans le terminal “est”, avant de prendre un bus de la compagnie (Cruz del Sur n’étant pas actif sur cette ligne) Los Milagros (“les miracles”…ça promet) à 5h15 dans le terminal “ouest”.
C’est délicat, mais nous tentons le coup. Après
Quelques explications.
Le canyon de la Colca est un impressionnant canyon, situé au nord d’Arequipa. Son point culminant est à 4.350m d’altitude, et sa profondeur est de…3.400m (pour rappel, le Grand Canyon, aux states, ne fait, au maximum, “que” 2.000m de profondeur). Tout en bas, coule la rivière Colca.
En général, les touristes y vont en tour, s’arrêtent pour la nuit dans le premier village, du nom de Chivay. Ils longent ensuite le canyon en bus pour admirer certains points de vue (tel Cruz del Condor, où les locaux dispersent de la viande dans la vallée, pour appâter le condor…et le touriste) et puis s’en vont.
Toutefois, il est possible, depuis le village (à 2h de Chivay) de Cabanaconde, de descendre dans le canyon. De rejoindre un oasis, tout en bas, au bord de la rivière, et d’y passer la nuit. Ensuite, soit remonter par le même chemin (si on a peu de temps), soit poursuivre le trek jusqu’aux villages sur l’autre versant, y dormir une seconde nuit (voire une troisième), et rentrer à Cabanaconde par un autre chemin.
Nous avons beaucoup hésité. Vous nous connaissez…on est des trekkeurs (ne pas rire…). Alors, on opte, évidemment, pour la descente dans le canyon. Non, sans avoir interrogé les mamans sur leur condition physique et leurs envies. Elles souhaitent relever le défi.
Vu que le temps nous est compté. On pense passer la nuit dans l’oasis, et remonter le lendemain. Ce qui est déjà pas mal, compte tenu des 1000 mètres de dénivelé (entre Cabanaconde et l’oasis).
Aussitôt pensé, aussitôt arrivés à Cabanaconde. Un charmant village, au cœur de…nulle part. Nous prenons des forces dans la maison des français. Un petit hôtel, nommé Valle del Fuego, tenu par Yamil et sa sœur. Il nous donne quelques conseils et nous propose, d’une fois arrivés à l’oasis, dormir chez Pablito, son frère. Une belle histoire
1, 2, 3…partez! Départ du trek. Les mamans semblent confiantes. A l’inverse, Angie & Nels se rendent très vite compte que ça va être “coton”. Le chemin est rocailleux, avec des marches très inégales, de la poussière. Bref, c’est pas hyper agréable. L’oasis est un minuscule point…tout en bas. Nous hésitons à proposer aux mamans de faire demi-tour, craignant pour la descente, mais surtout pour la montée du lendemain. Mais vu leur enthousiasme et leur détermination, nous ne voulons pas les décevoir. On poursuit.
Les paysages sont grandioses. Vraiment superbes. Peu de trekkeurs. Quelques mules. Et quelques locaux. Dont Panchito, un indien qui nous aborde en quechua (non! Pas la marque de chez Décathlon). Le quechua est la lingua franca (la langue véhiculaire, comme l’anglais de nos jours, dans bon nombre de pays) des Incas (et non, sa langue officielle – qui est l’aymara). Elle est toujours utilisé au Pérou et en Bolivie, et y est même devenu une langue officielle. Mais nous y reviendrons plus tard. Un vrai personnage que ce Panchito. Il monte le canyon à une allure folle, et ce, malgré ces bons 60 ans.
Les heures passent. L’oasis semblent être un mirage. Il ne semble pas se rapprocher. Ce n’est pas pour nous rassurer. Cela fait déjà 5h que nous marchons. La descente est normalement prévue en 2 à 3h. Nous tentons de rester rassurants vis-à-vis de nos mamans. Mais la tombée de la nuit n’est plus loin. Mae commence à stresser de ne plus rien voir dans le noir, et file telle une flèche. Choum mord sur sa chique et continue à avancer malgré sa cheville gonflée. Elles sont vraiment courageuses!
Il est 18h, la nuit est quasiment tombée, nous avons marché 6 heures. Ce n’est vraiment pas une promenade! Les mamans ont tout donné et nous sommes très fiers d’elles. “Oasis, nous voici”!
La délivrance de l’arrivée fait vite place à deux soucis:
1. Il n’y a plus de place. Ni chez Pablito, ni ailleurs. Il ne reste qu’un dortoir (très sommaire) avec deux lits (les deux autres sont pris par un couple de hollandais). Nels parlemente avec le très sympa Pablito. Il nous trouve une vieille tente pourrie, plantée “avec les cochons”, dans laquelle nous pouvons dormir. Ca nous enchante moyen, mais c’est mieux que rien!
Tout cela, c’était sans compter sur la gentillesse légendaire du hollandais. Verdooooome jonge! En effet, le jeune couple nous propose de ne garder qu’un lit, ainsi nous pouvons prendre le troisième. YEEES!
2. La montée du lendemain. Nels s’est mis en tête (à juste titre) que ce sera too much pour les mamans. Trop long (il nous faut être à 13h à Cabanaconde pour prendre un bus de retour) et surtout, trop difficile.
La solution? Les mules. Malgré un premier refus des mamans, nous insistons. C’est la meilleur solution. Pour Choum, c’est une vrai épreuve qui se profile à l’horizon. Mais c’est la seule façon d’y arriver.
Ces deux problèmes résolus, nous pouvons prendre nos marques dans l’oasis (dont nous ne verrons pas grand chose finalement). Les conditions sont plus que basiques. Ce détail est vite oublié lorsque nous passons à table. Nous la partageons avec un couple de français. Un bon repas et un bon thé, avant de filer au lit. Dans notre dortoir: 4 murs, un toit, 4 lits.
Le réveil sonne à 5h20. Le petit dej’ pour nous donner des forces. Le muletier nous demande de le suivre. Les nombreuses mules sont garées à proximité. Nos mamans ne sont pas les seules. Une douzaine de personnes sont de la partie. A notre grand étonnement, des petits jeunes de 20 ans s’épargnent également la montée à pieds (un scaaandaaale, mon p’ti môsieur!). Nels paye le muletier et lui rappelle clairement que les deux mamans doivent faire le périple E.N.S.E.M.B.L.E. (chacune sa mule) et qu’un muletier doit tenir au moins la mule de Choum.
Evidemment, rien ne se passe comme prévu. Les mamans sont les dernières. La mule de Choum est envoyée en premier, au galop, et seule. C’est la panique. Mae, telle une gaucho, se précipite sur sa mule et essaye de la chevaucher pour partir à la poursuite de Choum. Angie & Nels crient sur le muletier, en lui rappelant que ce n’est pas ce qui était prévu, et qu’il a intérêt à rattraper le coup.
Au loin, nous les suivons des yeux. Et, sommes à moitié rassurés de voir que le muletier et Mae ont rattrapés Choum. Toutefois, nous demeurons inquiets. Quand on voit la façon dont les mules abordent la montée, on ne peut s’empêcher de penser à la chute.
A notre tour, nous nous lançons à l’assaut du canyon. Munis de nos bâtons, allégés de nos sacs (sur les mules), chaussés de nos belles chaussures de trek, nous entamons la montée au rythme de champions. L’inquiétude pour nos mamans nous fait pousser des ailes karmichiennes (voir nos articles au Népal). Nous dépassons très vite les groupes partis avant nous. Angie mène le bal. Nels ne pourrait aller plus vite. En parfaite symbiose, nous organisons la montée sur les 1000 mètres de dénivelé. Une pause après avoir pris 500m, pas avant! Les paysages sont toujours aussi impressionnants. Mais notre objectif est d’atteindre Cabanaconde, au plus vite.
C’est chose faite, après…2h30 de montée! 2h30 au lieu des 3 à 5h prévues. Nous retrouvons nos mamans saines et sauves (le danger était réel. Dans le groupe, une jeune femme a chuté de sa mule…sans grand dommage). Le soulagement! Nous avions un peu sous-estimé ce trek. Heureusement, tout se termine bien. Avec au passage, une superbe expérience pour nos mamans. Choum aura dépassé sa peur. Mae aura kiffé l’aventure.
Une bonne douche et une steak d’alpaga pour tout le monde (Nels fera l’impasse sur le steak). Une petite promenade dans Cabanaconde et hop…un nouveau bus! 5h avec Los Milagros pour retourner à Arequipa.
Le trajet est long, mais S.P.L.E.N.D.I.D.E.! Le soleil se couche sur l’Altiplano. Ses rayons oranges éclairent les sommets et nous offrent un spectacle inoubliable. En guise de bande originale, un CD (qui aura tourné en boucle) de tubes péruviens. Musique romantique, légèrement mélancolique, dont les textes mettent à l’honneur l’amour et l’absence de l’être aimé. Mignon!
Nous arrivons à Arequipa. Le soleil s’est couché depuis longtemps. Pas nous. Le terminal de bus sera notre abri pour quelques heures. Nous récupérons nos affaires. Rangeons nos sacs. Et avalons une merveilleuse spécialité locale: la papa rellena, une pomme de terre fourrée de viande hachée. Mmmh.
Un nouveau bus de nuit. Cruz del Sur, encore! Le trajet sera pénible… Angie tombe malade (l’alpaga probablement) et passe une nuit horrible. Le soleil se lève, nous arrivons enfin à Cusco.
Nous avons besoin d’un peu de repos…
A suivre…
Les photos sont ICI!
Nels
manocko
si si tout s'est bien passé comme ça... j'étais là pour en témoigner..LOL J'arrive pas à y croire que la petite vieille que je suis..hihihi a fait tout ça...Y a juste cette délicieuse soupe aux foies,coeurs et estomacs de pollo qui ne passait pas ! hihi : pour le grand bonheur de Mae ! Bisous les globe-trotteurs et encore merci pour toutes ces émotions partagées ...je vous aime
30 juillet 2011 à 13:15
Anonyme
Toujours aussi passionnant! Félicitations aux mamans et à vous aussi biensûr! De nouvelles images dans la tête... en attendant la suite! Bisous à vous du fond de mon canapé, à nv au repos forcé!
Tine
30 juillet 2011 à 14:00
Caro
Chapeaux bas aux mamans, impressionnantes ! Suis pas sure que j'aurais eu ce courage ! Sans vous oublier bien sur, vous devenez des recordman/woman des trecks de dingue !
bisous à tous
1 août 2011 à 09:45
Tivieux
Vite que tu rentres, Nels ! Pffff... ENCORE 3 mois à attendre pour comprendre ce que tu expliques avec la langue "Aymara"...logique trivalente...pas d'exception...je ne comprends pas bien. J'ai pas fait assez d'études sans doute.. à bientôt
4 août 2011 à 19:19
Anonyme
Bravo aux mamans!
Nam
5 août 2011 à 14:03